jeudi 21 mars 2024

Resouvenirs à Prabouré

 


Prabouré, c'était il y a bien longtemps. La petite route monte toujours dans les bois, bordée par quelques maisons bien retapées. En haut, des affichages, une maison d'accueil pour les touristes, un grand centre qui propose des balades avec des chiens de traineaux actuellement désœuvrés. Ils aboient après l'unique visiteur. Je me dirige plutôt du côté du cadavre du Centre de Montagne. L'abandon puis le vandalisme ont ruiné le bâtiment.


Je me fais une séance d'Urbex pas trop marrante en marchant sur les débris. Les portes sont arrachées, les vitres cassées, le toit fuit, la piscine est occupée par un gros matou hérissé qui fuit mollement vers l'extérieur, la cafeteria servirait aisément de décor à un film post apocalyptique, les cuisines sont vidées. Ici, des gens ont vécu, travaillé, souffert et rigolé ; il n'y a plus rien, même plus de quoi se construire un souvenir.


Je fuis vers la station de ski. On compte maintenant cinq remonte-pentes sur cet espace si mesuré : la descente la plus longue est donnée pour durer un peu plus de trois minutes ! Comment peut-on investir dans le ski à cet endroit et en 2024 ? Pourtant, des bâtiments sont construits là et la zone est aménagée pour le tourisme. On a saigné la forêt avec de larges allées pour les sportifs en traineaux, en raquettes, en skis…


Il semble aussi que le tourisme d'été soit bien développé. J'en reste étonné : c'est si laid, si peu soigné avec des remblais un peu partout, les ornières de engins, les trous des chemins comblés avec des briques cassées. La neige pourrait cacher tout ça mais il n'y a plus de neige.


Je prends le chemin qui monte à travers les pistes. Sur les plateaux, les aménagements ouvrent des routes de gazon à travers les étendues de callunes, quelques tourbières subsistent mais j'ai l'impression qu'elles ont beaucoup régressé et certaines ont été plantées et asséchées. Les Hautes Chaumes, c'est encore très beau mais plein de cicatrices. Les jasseries sont rénovées, les gîtes fleurissent,  on a tracé des parcours à thèmes un peu partout.


Un petit tour au château de la Roue à peine accessible par un chemin défoncé par les débardages. Une association semble s'occuper du bâtiment et on ne peut plus entrer. La vue de l'extérieur ne fait pas rêver et on a de la peine à comprendre que c'était un but de promenade apprécié des vacanciers.  C'est enfin le moment de prendre la route vers le col de Chalmazel ses virages, ses gîtes au milieu d'anciennes pâtures aux allures de gazon bien vert, éclairées par la lumière chaude du soleil couchant. C'est très beau, très propre.


Je m'arrête à la jasserie du Coq Noir. C'est la seule qui soit recouverte d'un toit de chaume. Gérée par une association, elle est ouverte de mai à octobre, donc fermée, donc le parking est pour moi seul.


J'avais un peu sous-estimé la fraîcheur de la nuit. Il a fallu me couvrir progressivement. Le thermomètre affichait 6 degrés au matin et le soleil commençait à éclairer un paysage bien givré. Il est pour l'instant hors de question de distinguer quoi que ce soit du côté du pare-brise couvert de givre. Qu'est-ce que c'est bien un chauffage qu'on allume sans sortir du duvet ! Je ne regrette pas les heures passées à l'installation.


Un quart d'heure après il faut bon et je peux apercevoir quelques moutons autour d'une jasserie en contrebas à travers la vitre latérale débarrassée de sa buée.


J'aurai pris mon temps : une heure pour déjeuner et me préparer mais me voici sur le chemin en direction de Pierre sur Haute. C'est une voie large et carrossable qui tranche les pâtures dont certaines sont clôturées.

Au Nord, Pierre sur Haute et sa station d'écoute hertzienne  m'indique la direction. Je n'irai pas jusqu'au bout : dix kilomètres de plateaux finiront par me lasser, d'autant que je reviendrai par le même chemin. Ça manque de variété même si la vue porte loin. A l'Est, tout est nimbé et on ne distingue pas les détails. L'Ouest se distingue mieux, les montagnes du Sancy conservent jalousement un peu de neige sur les sommets. Ici, la saison hivernale a fait son temps. Il n'en reste que les installations moins discrètes que les jasseries qui ont tendance à se chercher un peu d'abri.