jeudi 31 août 2023

Jour 9 : à travers la Moravie

A travers les plaines mornes de cette région à une petite centaine de kilomètres à l'est de Prague, sous une petite bruine qui n'arrange pas le décor.
Nous atteignons Pardubice pour une balade dans la ville, un excellent chocolat dans un pub aux multiples salles très esthétiques.
Petite discussion avec le propriétaire. Il pleut. La ville est moderne, les immeubles passent progressivement de l'époque soviétique aux constructions plus esthétiques.
Notre premier contrôle des papiers de la part de la police qui devait se demander ce qu'on fichait sur les petites routes qu'on affectionne. Leur voiture banalisée nous double en clignotant d'un peu partout puis affiche un rouge follow me sur la lunette arrière jusqu'à ce que nous trouvions un endroit où nous garer, ce qui n'est pas immédiat dans cette région de pentes courtes et si sinueuses. Ils réclament mes papiers, ignorent ceux de la voiture après avoir compris que nous étions des touristes dans un véhicule utilitaire. Sourires, au revoir, en anglais.
Une colonne de la peste, on en trouve une dans presque chaque ville, en ex-voto de remerciement pour la fin de la pandémie. Je n'arrive pas à trouver l'équivalent pour le COVID mais ça doit bien exister.
Litomyšl est plus petite, le chocolat est remplacé par une glace au caramel, mais le café tient toujours. Le château est immense, en travaux.
Smetana est né ici, le musée qui est sensé faire visiter sa maison natale est une arnaque complète, à peu près rien ne possède la moindre authenticité, y compris l'agencement de l'appartement, l'immeuble ayant été intégralement refait depuis.
Bien mieux,  un salon de jouets pour enfants et puis un curieux aménagement, encore pour enfants, avec des trappes, des portes, plein de découvertes à faire autour de l'histoire locale (je crois).
Di certains magasins restent dans leur jus, d'autres sont plus ambitieux ou originaux :
Nous rejoignons une région karstique vers le bourg au joli nom de Sloup. Ici, c'est le Nord d'une zone truffée de grottes et nous nous proposons de visiter la plus proche demain matin.

mercredi 30 août 2023

Jour 8 : il pleut, mais pas toujours

Ce n'est pas qu'il fasse très froid, il fait 16 degrés à l'intérieur du fourgon ce matin au réveil. Il a plu à peu près toute la nuit avec quelques accalmies. Heureusement, le poncho sur le toit étanchéifie bien notre univers.

Nous profitons du temps maussade pour faire durer le petit déjeuner et organiser un peu la suite.
A Panská Scála, une colline qui n'a l'air de rien, on se demanderait bien pourquoi un parking est si bien organisé là. Une petite balade fournit rapidement la réponse quand on découvre les orgues basaltiques dressées.
Avant d'être protégé au XIX, ce site était une carrière. C'est même cette extraction qui révèle ces orgues à peine inclinées, de 5 ou 6 côtés, d'une quarantaine de mètres de haut.
Liberec, l'occasion de boire un chocolat et un café en ville après avoir regardé une petite expo de verriers sur la place.
Quand le temps est enfin sec, on peut refaire l'étanchéité du toit en espérant que ça fonctionne cette fois-ci. Bien sûr il n'est plus question d'aérer par là, c'est bloqué.
Hruboskalsko, ce sont de superbes formations formations rocheuses (Hrubá Skála rock town) que certains écrits anglais nomment la ville rocheuse. Impressionnant décor de pitons rocheux dresses au milieu des forêts aux fûts élancés, comme si tout courait à la recherche de la hauteur.
D'ailleurs notre balade nous fait passer par l'Arboretum Bukovina Novi Stav et par un emplacement à la mémoire des alpinistes tchèques morts en montagne. Ils sont nombreux.

mardi 29 août 2023

Jour 7 : il pleut

Il pleut. C'est l'automne. Hier soir, les averses s'incrustaient par le toit ouvrant qui, justement, ferme mal. On a foi dans la réparation de ce matin qui a consisté à condamner l'ouverture à grand renfort de tap collant. Mais la foi, justement, c'est comme les bandes de scotch il faudrait la placer mieux, ça nous l'apprendrons bientôt.

 Parce qu'il pleut. C'était bien tranquille pour se balader dans Litomērice sous une petite bruine pas trop gênante. Dans cette ville, on retrouve, comme d'habitude, la place centrale, les arcades, les bâtiments de style baroque, les couleurs pastel, les rues pavées, la colonne de la peste et un office de tourisme.

Pour agrémenter notre déambulation dans les rues, le musée des marionnettes, tout en Tchèque y compris l'accueil très souriant de la matrone derrière son bureau. Un escalier et deux salles peuplées de marionnettes, quelques explications (en fin d'article - merci le traducteur en ligne) et un bonbon en repartant.
Nous prenons un bon café et un excellent chocolat chaud. Nadine explore une quincaillerie "d'enfer", c'est à dire avec plein de gadgets esthétiques pour la cuisine. Dans les rues, il n'y a pas grand monde, des gens de troisième âge, des femmes avec ou sans enfants, mais où sont les jeunes hommes ? Au boulot ?
Un peu de route encore pour rejoindre l'Elbe plus loin.
Nous avons repéré Decín, son château, son port et son musée de l'horlogerie, enfin on pensait que c'était le sujet.
Il a fallu le trouver, ce musée, niché dans les combles du château.
Après paiement, une jeune dame munie d'un trousseau clés conséquent (la plus longue devait bien mesurer une trentaine de centimètres) vient nous chercher.
Elle ouvre les portes une à une, nous montons les escaliers, passons des couloirs décorées au massacre, grimpons jusqu'au grenier où une association expose là des horloges et pendules électrifiées ou originellement électriques.
 L'intérêt n'est pas flagrant. Heureusement que la traduction en ligne existe parce que les explications sont en Tchèque et notre guide est juste là pour les clés. Bon, bof mais amusant.
Puis elle nous ramène à la porte. Au revoir...
Il pleut et la fenêtre de toit fuit. Dessous, eh bien c'est le lit. Dommage. On dispose comme on peut un poncho, des assiettes...
Hrensko, cest déjà la "Suisse tchèque" et c'est sensé être un beau village et un départ de randonnées. Nous sommes proches de la frontière allemande et le bourg est constitué autour de la rivière, une rue de chaque cote. La rive ouest est peuplée de magasins chinois. 
Tout est made in China, les commerçants parlent chinois entre eux, ils attendent les clients allemands jusqu'à tard le soir en exposant vêtements, sacs à dos, gadgets... Même le gardien du parking semble chinois. Nous buvons un café et un thé dans un restaurant tenu par... un Allemand qui s'ennuie tout seul dans son coin.
Il est trop tard pour aller voir l'arche naturelle Pravčická brána, accessible à pied seulement. Les lieux sont dévolus à l'exploitation touristique et même les villages ont leurs parcmètres. Garer sa voiture signifie obligatoirement payer un droit de stationnement. Une partie de la route pour Pravčická brána est autorisée à la circulation mais on ne peut pas s'y arrêter, l'autre partie est tout simplement interdite mais un petit train peut t'emmener au bout si tu ne veux pas marcher. Par contre, tout ferme avant 18 heures. Nous n'avons pas le temps de faire le trajet à pied et c'est trop tard pour le petit train.
Nous nous rattrapons à Mezna, un peu plus loin. Une petite route nous emmène jusqu'au hameau où les maisons retapées témoignent de la bonne fortune de leurs propriétaires. Le coin est superbe, tranquille, il domine les forêts malheureusement atteintes par les pluies acides.
 Un sentier descend jusqu'à la rivière qu'un pont en bois enjambe. C'est vraiment beau. D'ici, quand il fait bon, quand c'est vraiment l'été, quand c'est plus tôt dans la journée, des barques ramènent les randonneurs jusqu'à Hrensko.
Mais c'est trop tard, nous dit un gars qui remonte le sentier en prenant son temps pour récupérer. C'est raide.
Nous continuons la route sous la pluie. Nous nous faufilons dans la forêt malade par endroits. Les maisons ont un style que nous n'avions pas rencontré ailleurs, de bois, massives, décorées quand elles ne sont pas uniformément noircies, avec des linteaux courbes et saillants qui protègent les fenêtres. Les villages sont vraiment très jolis mais la pluie et les fuites gâchent un peu la fête.
Park4night nous trouve un parking en campagne près d'un village et du lac Velky Rybnik. La pluie toujours mais nous avons du gravier sous les roues, couvrons la fenêtre de toit d'un poncho et allumons le chauffage pour faire sécher la literie. Dire que nous subissions la canicule avant-hier. Avant-hier seulement ?

Marionnettes tchèques, traduction automatique des affiches
Le théâtre de marionnettes conquiert le cœur des enfants et des adultes depuis des siècles. Grâce au mystère et à la capacité magique des marionnettistes à donner vie aux marionnettes en bois, il développe l'imagination du public et lui offre la possibilité d'entrer dans le monde des contes de fées, des mythes et des rêves. Depuis le XVIe siècle, des marionnettistes itinérants et leurs théâtres nomades apparaissent sur le territoire tchèque. Avec leurs pièces, ils ont tellement inspiré le public tchèque que des familles entières de marionnettes ont commencé à se consacrer à la marionnette comme source d'inspiration dès la seconde moitié du XVIIIe siècle. Ils ont transmis leurs compétences et leur expérience de génération en génération et ont ainsi assuré la préservation de cette tradition à travers les changements jusqu'à nos jours. Chaque nouvelle génération améliore son interprète en l'enrichissant de sujets d'actualité ou en supprimant des éléments non fonctionnels, mais le noyau des spectacles de marionnettes est préservé. Aujourd'hui, les marionnettes tchèques sont déjà un phénomène reconnu dans le monde et sont considérées comme un patrimoine culturel précieux. Depuis le 1er décembre 2016, les marionnettes tchèques et slovaques sont inscrites sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité de l'UNESCO. Il devient ainsi le cinquième domaine inscrit sur cette liste pour la République tchèque, après Slovácký verbuňk (2008), Masopustní obchůzky a masky na Hlinek (2010), Jizdy kralů na sud-est de la République tchèque (2011) et Falconry (2012). Même avec cette exposition à la Galeria Marione de Litoměřice, nous pouvons montrer que la marionnette tchèque est encore un phénomène vivant. Le théâtre de marionnettes fascine encore aujourd'hui les enfants, de nouvelles marionnettes et ensembles de marionnettes sont encore créés et il existe encore des sculpteurs et des marionnettistes qualifiés qui consacrent leur cœur et leur esprit à ce métier.
JAN KAISER 8.7. 1950-6.4. 2012
 Jan Kaiser est né à Dejvice à Prague d'un professeur de maternelle et premier violoniste de la Philharmonie tchèque. Il aimait beaucoup moins s'asseoir à un bureau et rédiger des devoirs que le travail créatif, le théâtre et l'art. Déjà en 1966, il en faisait partie du théâtre de marionnettes amateur Brouček à Prague - sur Lotyšské náměstí. Il a commencé par s'occuper de la technologie et de l'entretien du théâtre, puis s'est impliqué de plus en plus activement dans la gestion du théâtre populaire pouvant accueillir environ 120 spectateurs. La production théâtrale de son premier auteur, comprenant des décors et des marionnettes, était un conte de fées intitulé À propos du brave Mana. Elle a connu un tel succès qu'elle a failli représenter le théâtre au festival de théâtre de marionnettes de Chrudim. Finalement, elle n'a pas été sélectionnée, mais la télévision tchécoslovaque de l'époque a fait un reportage sur elle dans l'émission Vlaštovka. Máña s'est fait remarquer avec un groupe de jazz sous forme de marionnettes, avec lequel les chefs d'orchestre ont complété l'ensemble du spectacle. Grâce à cet intérêt, d'autres spectacles populaires tels que Général Cibulka ou Kašpárek Čaruje ont été créés sous la direction de Jan Kaiser. En 1975, le théâtre amateur de marionnettes de Brouček a fermé ses portes, le câblage électrique a brûlé, les marionnettes ont disparu et personne n'a relancé la tradition. Après cela, Jan Kaiser se consacre principalement à la photographie de nature, complète ses études et fonde une famille. Après la Révolution de velours, lui et sa femme ont acheté une ferme sous la montagne Říp, où il a recommencé à créer, a créé l'atelier de ses rêves et a créé de nouvelles marionnettes non seulement pour les magasins de Prague, mais aussi pour le plaisir. Aujourd'hui, ses œuvres égayent les foyers de centaines de personnes dans notre pays et dans le monde, elles sont exposées au Musée japonais, et même l'acteur français Gérard Depardieu en est fier.

lundi 28 août 2023

Terezin

Nous étions en montagne ce matin dans une paix totale. Nous avons trouvé de l'eau pour faire le plein.
Le temps était maussade, humide, même dans la plaine, Teplice ne ressemblait pas à une ville de Bohème, c'était tout simplement une ville moderne qui ne s'occupe pas trop de tourisme et vit sa vie de ville, assez tranquille elle aussi ce dimanche matin.
Nous avons rejoint l'Elbe à Ùsti Nad Labem. Un barrage  la coupe net. Vers le Nord, l'Elbe se navigue vers Dresde en Allemagne. Vers le Sud, l'Elbe se navigue aussi mais on n'a pas vu beaucoup de monde dessus : un bateau de croisière collective, quelques barques, et des embarcations appontées sur chaque rive, en moins grand nombre que les villas étagées sur la rive Est.
Mais ce n'est pas le sujet du moment. La journée , on la passe à Terezin.
Terezin : une double forteresse Vauban du XVIII° avec la garnison qui se retrouve désormais dans une des musées de la ville. Mais ce n'est pas le sujet.
Terezin, au XX°, c'est la transformation des deux forteresses Vauban : puisqu'elles retenaient les assaillants qui venaient de l'extérieur, elles pourraient bien confiner les indésirables pendant la deuxième guerre mondiale.
La grande forteresse est devenue un guetto. On  bouchait les issues, on enlevait les habitants et à la place on entassait les juifs, un solution plutôt simple 
La petite forteresse était transformée en camp de concentration. 
Avec la ligne de chemin de fer, on avait là un outil adapté pour recevoir des prisonniers d'un peu partout en Europe, prisonniers qu'on pouvait renvoyer, s'ils survivaient. Ils étaient alors redirigés vers des camps de concentration comme Auschwitz. Tout était bien organisé, la bureaucratie nazie faisait de son mieux.
Elle a même réussi à abuser la Croix Rouge quant aux conditions de vie dans le ghetto. Terezin c'était l'administration efficace, fours crématoires compris. 
On trouve encore quelques fantômes et les visiteurs ne sont pas trop nombreux : il est possible de déambuler à sa guise dans les espaces et de se plonger dans les affichages et les reconstitutions.
La petite forteresse, on ne s'y perd pas, c'est facile, on accueille ici, on entasse là, on soigne comme on peut et il est aussi possible de mourir executé par un peloton si le typhus n'a pas gagné avant.
Desnos est mort du typhus, un mois après la libération du camp par les Russes.
Les femmes avaient leur quartier, et la fin de la guerre a  vu apparaître les Allemands de Tchéquie, ceux qui étaient maintenant dans le camp des vaincus.
La grande forteresse enfermait le guetto, une ville surpeuplée où l'espérance de vie se reduisait dans la promiscuité. On y crevait ou alors on partait pour un camp mourir un peu plus loin. Les statistiques étaient effroyables mais les gardiens et leur famille avaient  leur piscine et leur cinéma, pas trop éloignés des fours crématoires particulièrement bien conservés, outils compris.
On a des bâtiments, des documents sous forme d'écrits, de nombreux et beaux dessins des artistes du ghetto et aussi un film dont il subsiste des bouts, tourné par les nazis et montrant une vie de ghetto absolument idyllique. De la grande œuvre de propagande dont les acteurs n'auraient pas l'occasion de revenir à l'écran.
Maintenant, la petite forteresse est entièrement transformée en un musée, la grande a retrouvé sa ville et des habitants libres mais elle a conservé certains bâtiments pour en faire le musée du ghetto. Ce dimanche pluvieux sur les rues quasi vides fait assez lugubre.